Tout le monde, quelque soit les âges, connaissent le terme de « graffiti » ou en ont au moins aperçu un dans leur vie sans le savoir. Les anciennes générations ont vu ce phénomène se développer à travers le temps, que ce soit dans les quartiers dits « sensibles » ou ceux plus considérés comme « agréables » par l’imaginaire collectif.
Voir apparaître ces œuvres murales n’ont pas été du goût de tout le monde entraînant des plaintes de certains riverains qui ont conduit à la mise en place de mesures d’effacement des graffitis. Pourtant en se promenant à Paris dans le 13ème arrondissement, les chances de tomber nez à nez avec une des 160 fresques sont assez élevées.
On peut donc légitimement se poser la question des limites permettant à autrui de juger si ces graffiti sont considérés comme de l’art ou comme du vandalisme. De plus, par quels critères sont ils évalués pour savoir si ils ont leur place ou non dans l’espace urbain ?
Prenons ces deux images en exemple que j’ai prises à Paris. L’une dans le métro de Paris et l’autre dans le 13ème arrondissement de Paris.
Qui y a-t-il de différent ?
Premièrement abordons les termes. La première œuvre est, je le pense, considérée pour une majeure partie des personnes comme étant un graffiti. Bien que les couleurs de ce dernier sont vibrantes (tout comme celles de la deuxième photo) cette dernière n’est pas considéré comme un « art » à part entière pour certains.
Tout d’abord ce qui pose problème dans ce style, c’est sa connotation sociale. Je suppose que peu d’entre vous on déjà observé un graffiti sur un immeuble du 16ème arrondissement ou dans les quartiers riches de votre ville n’est-ce pas ? Cette image du graffiti dans l’imaginaire collectif ne représente pas seulement une peinture sur un mur. Il porte un caractère social, il véhicule chez certaines personnes un sentiment d’insécurité car il est souvent relié à des quartiers dits « sensibles ».
De plus, d’après le texte « L’effacement des graffitis à Paris :
un agencement de maintenance urbaine » de Jérôme Denis et David Pontille, les graffiti seraient aussi directement liés à la théorie de « la vitre brisée ». Cette théorie est une idée selon laquelle les incivilités « minimes » dans l’espace urbain telles que des vitres brisées ou des graffitis inciteraient à plus d’incivilités et de destructions de l’espace public qui ne cesseraient d’augmenter par la suite dans un cercle sans fin jusqu’au délabrement complet du lieu. C’est donc pour ces raisons citées ci-dessus que des mesures sont prises pour effacer ces graffitis dans les lieux publics.
Mais quelle est donc la différence avec la deuxième photo ?
Il est ici nécessaire de parler terminologie. Cette fresque appartient au domaine du « street art ». Une majeure partie de ces peintures murales sont commandées par la ville auprès d’artistes. Contrairement au graffiti, le but premier du street art est esthétique mais il est aussi vecteur de message.
Artistes engagés et bouleversement des dynamiques urbaines
Prenons le cas de « streetart13 » du 13ème arrondissement. Cette campagne a été lancée par le maire de l’arrondissement, Jérôme Coumet et le directeur de la galerie Itinerrance, Mehdi Ben Cheikh. Certains artistes du quartier s’étaient appropriés la tour 13 qui était à l’époque vide pour réaliser leurs œuvres. Cet événement a entrainé un fort engouement attirant des touristes venus du monde entier. Ce bâtiment qui représentaient le souvenir des familles qui y avaient vécues auparavant se transformait peu à peu en lieu touristique et populaire de la capitale. Le street art avait changé la mémoire du lieu. Il ne représentait plus simplement une habitation mais un musée à ciel ouvert.
Par la suite, cette coopération s’est poursuivi et chaque année des équipes d’entretien ainsi que de nouveaux artistes viennent ajouter leur touche au quartier.
Non seulement le street art redessine les dynamiques des milieux urbains mais il sert aussi à transmettre les mémoires. L’exemple du mémorial de la Shoah en est une illustration parfaite. Du 16 juin au 1er décembre dernier Christian Guémy a rendu hommage aux victimes de l’Holocauste à travers 14 portraits d’enfants juifs. A travers ces images émouvantes, nous pouvons mettre un visage sur ces longues listes de noms. Durant quelques mois, la mémoire est dépeinte sous la forme du street art qui disparaîtra dès décembre. Temporaire mais lourdes de sens, les œuvres produites par les street artistes professionnels permettent de faire passer un message et de préserver les souvenirs de notre histoire passée.
https://www.Paris zigzag.fr/sortir-paris/tendances-culture/le-street-artist-c215-peint-les-portraits-de-14-enfants-rafles-a-paris-au-memorial-de-la-shoah
Texte d’étude : « L’effacement des graffitis à Paris : un agencement de maintenance urbaine » de Jérôme Denis et David Pontille